Aide aux personnages

Cette aide n'a pas vocation à parler de la création de personnages originaux, simplement de l'utilisation de personnages déjà existants dans le cas de fanfiction. Bien sûr, il existe de grands principes sur lesquels peuvent se construire un personnage original mais je vous laisse faire les rapprochements tout seul comme des grands. Vous vous rendrez parfois compte que j'enfonce des portes ouvertes car certains points sont évidents. Cependant, il n'est pas mauvais de les rappeler car le newbies moyen, enflammé par sa passion toute récente, se fait généralement un plaisir d'oublier ces points qui n'en sont que plus importants.

Je pars du principe que vous, lecteurs de cet exposé, comprenez le vocabulaire utilisé dans la fanfiction. Si ce n'est pas le cas, vous disposez d'un lexique sur ce même site.

Voici donc comment nous allons aborder le sujet, en cinq points plus une conclusion :
1. Le personnage principal n'est pas vous
2. Définir le personnage emprunté
3. Le passé conditionne le futur
4. Personnage principal et point de vue
5. Réactions du personnage selon la situation
6. Conclusion

1. Le personnage principal n'est pas vous

Partie essentielle de l'aide aux personnages, à bien retenir !

1.1 Le personnage principal n'est pas vous (bis repetita)

Ça peut vous paraître évident mais beaucoup d'auteurs s'identifient à leur héros, et je ne parle pas forcément de Self-Insert ou de Mary Sue.
Pour le newbies moyen, il est plus facile d'écrire en se prenant pour le héros, que ce soit conscient ou pas. Comment savoir que vous êtes à la place du personnage principal ? Facile : chaque remarque faite à l'encontre de votre histoire vous sera proprement insupportable puisqu'elle vous touchera directement.
Il faut bien se rendre compte d'une chose : les personnages de fiction sont des créations extraordinaires ; ils nous paraîtraient étranges, bizarres, totalement incroyables si on les avait à côté de nous dans le bus ou le métro. Les héros de série américaine sont très bien pensés mais, aussi complexes soient-ils, ils ne sont pas "normaux", pas assez banals. Quant aux personnages de mangas, de romans, de bandes dessinées, n'en parlons pas : croiser un gars s'étirant comme un élastique, ça n'arrive pas tous les jours.
Instaurer une limite entre vous et votre champion ne pourra que faire du bien à l'histoire : vous aurez naturellement tendance à remettre en doute ses actions, ses faits et gestes, ses paroles (et douter permet d'avancer puisqu'on réfléchit à nos choix) ; vous vous rendrez compte qu'il existe d'autres personnages, ce qui apportera une diversité appréciable (combien d'histoires tournent autour d'un couple, voire de deux couples ?) ; vous ne vous attarderez pas sur le malheur d'une seule personne.
Moins vous vous identifierez volontairement à votre héros, moins vous risquez le Self-Insert et l'auto-complaisance. Ayez toujours cela en tête : si vous publiez, ce n'est pas pour satisfaire votre ego mais pour partager. Et ça va bien cinq minutes de suivre un énième Caliméro mais les lecteurs peuvent aussi en avoir marre.

1.2 Enfin, quand même un peu

Écrire en se prenant pour le personnage est quand même plus facile pour beaucoup de gens. Cependant, il vaut mieux choisir de s'identifier à un personnage plutôt que de le subir. Le plus difficile va être de poser une limite : où vais-je basculer dans le Self-Insert ?
Il existe une astuce toute simple pour fixer cette limite : implanter volontairement une partie de vous dans le personnage que vous utilisez principalement. Il faut, bien sûr, que cette caractéristique soit en accord avec le personnage et réfléchir sur ce point risque d'être quelque peu difficile. Par exemple, vous écrivez une fic Naruto et votre héros est le ténébreux Itachi. Bien. Demandez-vous ce que l'on sait vraiment d'Itachi, détachez le fanon du canon, faites une liste si nécessaire puis regardez ce qui colle avec vous. On sait qu'Itachi met du vernis à ongle, comme tous les membres d'Akatsuki. Tiens, vous aussi ! Alors faites-le se plaindre de la couleur ou bien donnez-lui une incompétence à ne pas dépasser des bords. Qu'importe, en vérité, tant que ça reste crédible (Itachi se contrôle très bien, il pensera beaucoup plus qu'il n'extériorisera) et que ça vous rapproche du personnage. Ainsi, il est un peu vous mais surtout lui. De plus, vous approfondissez le personnage en lui ajoutant des détails triviaux qui le ramènent à son statut d'humain lambda. C'est tout bénef'.

1.3 Le lecteur non plus n'est pas vous

J'insiste lourdement dans cette première partie mais c'est vraiment fondamental : le personnage principal n'est pas vous (enfin, quand même un peu). Il s'agit de fixer une limite entre lui et vous. Donnez-lui un peu de vous si ça vous chante, que ce soit parce que c'est plus facile ou pour approfondir le personnage mais un tout petit peu, trois fois rien, une poussière qui ne changera pas le comportement global du personnage ni la version qu'en ont les lecteurs. Si vous avez de gros changements à faire pour le bien de votre histoire (auquel cas je préfère dire : écris une fic originale plutôt que de ne garder que le physique d'un personnage), expliquez-les ! Le lecteur n'est pas et ne sera jamais dans votre tête ! Toute modification doit être justifiée ! Itachi a soudainement envie de se raser le crâne ? Trouvez une raison (un katon qui a mal fini, des poux, un chewing-gum), d'autant plus valable qu'elle change le personnage de manière radicale. Et s'il est trop changé, s'il est plus vous que lui, oubliez la fanfiction et passez à la fic originale.

2. Définir le personnage emprunté

Il faut savoir que les quatre points abordés dans cette partie auraient pu être plus nombreux mais j'ai décidé de me limiter à des choses que l'on sait généralement, si tant est qu'on ait lu (ou vu) correctement la série d'origine. Tous ces points sont inter-influençables, c'est-à-dire que l'un influe librement sur l'autre et cela en fonction d'une grande inconnue : l'esprit humain.

2.1 Caractère

Un personnage se définit d'abord par son physique si l'on se trouve dans une œuvre visuelle (série télévisuelle, bande dessinée, manga, etc) mais le point le plus important, en tout cas à mon sens, est avant tout son caractère ; c'est pourquoi nous traiterons ceci en premier.
Il est essentiel de bien cerner un personnage pour pouvoir bien l'utiliser. En effet, connaître son caractère nous permet de prévoir ses réactions. Ce sont des choses toutes bêtes que tout le monde sait sans même s'en rendre compte. Par exemple, quelqu'un de susceptible se braquera si on lui fait une remarque qui ne lui plaît pas (coucou les ado !) ; quelqu'un de naïf ne se rendra pas compte qu'on l'utilise ; quelqu'un d'ouvert ira facilement vers les autres et aura une certaine passion pour le dialogue. De ce fait, on aura plutôt un solitaire qui se trompe régulièrement et ne supporte pas, de toute manière, qu'on le corrige, une bonne poire qui prêtera de l'argent ou ira faire quelque chose à la place des autres et quelqu'un qui n'hésitera pas à faire des rencontres, à entamer la discussion avec le premier venu, etc.
Vous n'avez pas besoin de faire de grandes recherches pour tel ou tel caractère : vous connaissez déjà les comportements des gens, même si c'est inconscient. Regardez simplement sa gestuelle (est-ce qu'il tire sa chemise ? est-ce qu'il croise les bras ? détourne-t-il la tête ?), étudiez son langage, son comportement, etc. Tout cela est très simple dans une œuvre visuelle et vous aurez de toute façon toutes ces informations dans un bon papier. Mieux : en lisant un livre, vous imaginez comment se comporte le personnage, sans même vous en rendre compte !
Eh bien il suffit simplement de vous appuyer sur votre savoir pour ne pas vous tromper de comportement selon le caractère du personnage.

2.2 Physique

Le physique d'un personnage est très important car il peut l'handicaper (ou l'inverse). Un personnage qui se trouve laid aura tendance à ne pas se mettre en avant, même s'il a de bonnes idées (regardez Ugly Betty). Au contraire, les gens qui se trouvent beaux et qui peuplent nos séries télés (vive la réalité) sont bien souvent insupportables parce qu'ils la ramènent tout le temps avec leur nouvelle montre Rolex offerte par papa, n'est-ce pas, ou le nouveau yatch (oui, c'est un cliché : le beau est souvent riche ou fils/fille de riche).
Il y a d'autres comportements dits "moyens" : les grands ont tendance à être protecteurs, les petits sont plus vicieux et hargneux ; les balafrés ne montrent pas leur corps ; les boiteux ne vont pas briller en sport ; le gothique tatoué avec une cape noire et le crâne rasé sera un méchant, etc.
Là encore, j'ai sorti quelques clichés mais il faut savoir que les lecteurs attendent des clichés (pas trop nombreux et pas trop gros, ça va de soi). Ce sont des éléments connus : le lecteur a ainsi des repères.
Il faut savoir jouer avec les clichés pour les détourner mais ce texte ne traitera pas du sujet.
Pour en revenir au physique, il est très important car il influe grandement sur le caractère et le comportement. Vous-même, n'avez-vous jamais essayé de vous tasser au fond de la classe parce que vous vous trouviez mal habillé/coiffé/maquillé ? L'image qu'on a de soi est subjective et modifie notre comportement. Il faut en tenir compte lorsqu'on écrit.

2.3 Habitudes

Nul en ce monde n'est libéré de ses habitudes. On a tous nos petites manies et elles sont révélatrices de notre personnalité. On a tendance à ne pas les remarquer mais elles sont importantes pour définir un personnage. Par exemple, si j'étais un personnage de fiction, vous me verriez mettre un point d'honneur à ce que mon ordinateur soit au centre du bureau, avec tous ce qui est matériel et/ou utile à droite et tout le reste à gauche. C'est ainsi que je définis mon espace de travail, que je répète quel que soit le bureau que j'investis. Vous en concluez quoi ? Que je suis... droitière ! En effet, les droitiers ont tendance à tout ordonner de cette manière car notre main droite bouge plus que la gauche, que notre vision est plus attirée vers la droite, etc, ce qui fait que les choses que l'on considère indispensables pour le travail se retrouvent à droite.
C'est une habitude comme une autre. Il est rare qu'on fasse attention aux habitudes des gens (à part la traditionnelle pizza du xxxdi, la douche le soir, etc), pourtant elles nous apprennent beaucoup. Elles peuvent provenir d'un conditionnement, du milieu social, d'une ritualisation, etc. Souvenez vous des Hobbits incrédules dans Le Seigneur des Anneaux lorsque Grands Pas leur dit qu'ils ne s'arrêteront pas pour prendre la collation : ils sont habitués à de nombreux repas et se retrouvent mal à l'aise lorsqu'on leur enlève cette habitude.
Car, oui, priver quelqu'un de ses habitudes le mettra mal à l'aise puisqu'il n'aura plus de repères rassurants. Je connais des gens capables d'étrangler une vendeuse s'il n'y a pas leur marque de café en rayon. Les habitudes et la privation d'habitudes sont des armes puissantes et de très bons informateurs sur les personnages.

2.4 Langage et comportement

A l'origine, ce point devait être une partie mais pas assez étoffée pour avoir ce rôle... Moi qui visais le plan parfait avec développement en trois points à chaque partie... Tant pis.
Or donc, le langage et le comportement sont deux points essentiels de la caractérisation d'un personnage. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'on ne parle pas tous de la même façon, qu'on ne se comporte pas tous de la même façon. Évident, je sais, mais un auteur débutant l'oublie neuf fois sur dix. Ses personnages ont tous la même manière de parler, les mêmes expressions, la même gestuelle... Eh bien non ! On a beau dire, l'égalité des classes, ça n'a jamais existé et ça n'existera jamais (coucou ! le communisme, ça a raté !).
Les différences ont plusieurs origines : le milieu dans lequel le personnage a grandi (milieu social), l'éducation qu'il a reçue, ce qu'il a vécu, l'époque à laquelle il vit, jusqu'aux conditions géo-politiques de son pays. Eh oui ! Nous, petits européens choyés, avons trop tendance à oublier qu'il y a des guerres dans le monde. Un petit Kosovare qui débarque en France pour x raison se trimbalera facilement avec un couteau sur lui parce qu'il n'a connu que la guerre, c'est sa manière de vivre.
Alors réfléchissez bien sur votre prochaine caractérisation dans une fic Naruto...

3. Le passé conditionne le futur

3.1 Importance de l'enfance (traumatismes)

Comme nous venons de le voir avec notre petit Kosovare, l'enfance est marquante.
Aujourd'hui, on a tendance à utiliser le mot "traumatisme" pour tout et n'importe quoi aussi vous ai-je trouvé les définitions médicales pour bien marquer le coup :
TRAUMATISME, nom masculin
B : PSYCHOLOGIQUE, PSYCHANALITIQUE
1. Violent choc émotionnel provoquant chez le sujet un ébranlement durable ;
2. Tout événement subit, brutal, entraînant pour le sujet qui en est victime des transformations plus ou moins profondes, plus ou moins réversibles ;
3. Excès d'excitation au point que la décharge est impossible et que l'organisme tend à supprimer toute excitation supplémentaire (par exemple par évanouissement).
Ok ? Un ongle cassé n'est pas un traumatisme.
Un fait marquant, ce serait plutôt du genre "mon grand frère a massacré toute ma famille" ou bien "j'ai essayé de ramener ma défunte mère à la vie" ou encore "toute ma classe a été tuée dans un train suite à un tremblement de terre qui m'a en prime coincé dans un tunnel avec deux survivants, un fou et une nunuche alors que le reste du Japon plongeait dans le chaos". Ça, d'accord, c'est du traumatisme !
Vous remarquerez certainement que les traumatismes les plus "cools" sont ceux qui ont attrait aux parents, à la famille. Pourquoi ? Tout simplement parce qu'un enfant voit ses parents comme des divinités (jusqu'à l'adolescence). Un parent est un pilier inébranlable, un point de repère et une source de sécurité. Enlever un parent, c'est enlever cette stabilité à l'enfant, qui en a besoin pour se développer.

3.2 Apprentissage

Combien d'enfants ont été dégoûtés des mathématiques, du français, de la natation par un professeur qu'ils ne pouvaient pas blairer ? Je ne discuterai pas des méthodes d'apprentissage parce que ce n'est pas l'endroit pour ça (et que ça durerait longtemps) mais c'est un fait : la manière dont on apprend est fondamentale.
Alors, ça peut en choquer plus d'un, mais on n'apprend pas qu'à l'école. L'apprentissage se fait déjà avec vos parents, pour ce qui est des bases du langage, de la politesse (*tousse tousse*) et de toutes ces merveilleuses choses qui vous feront bien vivre en société. Ce n'est pas à l'école de tout apprendre aux enfants. La confrontation à l'autre est aussi une méthode d'apprentissage.
Bref, un gosse que les parents n'auront pas éduqué risque de devenir un tyran faiblard et paresseux doublé d'un incapable. Un gosse livré à lui-même sera débrouillard (sinon, il meurt). De même, un enfant curieux aura tendance à plus vite se détacher de ses sources de savoir de base, à savoir ses parents et ses professeurs.
La manière dont on apprend est importante car c'est un des composants du comportement. Faites de vos gosses des assistés, ils seront faibles. Laissez-leur l'occasion de se débrouiller seul (je ne dis pas non plus qu'il faut le lâcher dans la forêt pour le week-end avec juste un couteau non plus...), ils seront plus aptes à réagir en cas de problème. Il ne s'agit pas de règles fondamentales et inébranlables puisque tout le monde réagit différemment face à un stimulus extérieur mais il faut quand même les prendre en compte.

3.3 Enfin, pas toujours...

Il y a toujours des exceptions à la règle et, à croire les nombreux romans que je lis, chaque héros est une exception (c'est d'ailleurs pour ça qu'il est le héros ou le personnage principal).
Cependant, vous ne créez pas un personnage, vous l'utilisez dans le cadre de votre fanfiction. C'est là une différence de taille car vous n'avez rien à inventer en ce qui concerne votre martyr. L'auteur de la série l'a fait à votre place, a réfléchi au passé de son personnage, à son caractère, à son comportement, etc. Votre travail à vous consiste à bien observer, à tirer des conclusions et à essayer de coller à ce personnage par la suite. C'est le jeu du perroquet, en somme.
Vous vous rendrez peut-être compte que votre chouchou est finalement trop anormal pour être un humain lambda et vous aurez certainement raison. Le héros est par essence meilleur que les autres, il a quelque chose à faire de sa vie, lui. Il arrive souvent que l'auteur oublie certains détails à propos de ses personnages (exemple : Naruto a douze ans lorsqu'il passe genin, Sasuke et Sakura aussi, pourtant Naruto a déjà redoublé deux fois. Explication de Kishimoto ? Aucune.). C'est d'autant plus vrai que cela concerne le passé du personnage. Du coup, on se retrouve parfois avec des maisons sans fondations si l'on décide de développer tel ou tel côté de sa personnalité.
Mon conseil serait de ne rien tenter si vous n'êtes absolument pas sûr de pouvoir rester IC mais j'ai tendance à être trop stricte ; je m'interdis des choses que d'autres font allègrement sans même utiliser leur cerveau. Alors faites, écrivez, inventez mais gardez bien en tête que tout ce que vous inventez doit coller au personnage, doit être (ou paraître) logique avec ce qu'il est, ce qu'on voit de lui. Par exemple, vous inventez un épisode de l'enfance de Fujioka Haruhi (Ouran High School Host Club) : n'allez pas la faire braver l'orage, elle en a peur à quinze ans et on sait même pourquoi !

4. Personnage principal et point de vue

Dernier point important lors de votre travail préparatoire. Une fois que vous aurez pris votre décision, vous pourrez attaquer votre fanfiction (ou l'abandonner). Le point de vue n'est pas la narration.

4.1 Personnage principal ou personnages principaux ?

On va clarifier les choses tout de suite (bien qu'il soit un peu tard) : un personnage principal n'est pas forcément un héros. Un héros doit être orphelin. Ça remonte aux mythes grecs et romains et c'est comme ça. Si votre personnage a des parents, ce n'est pas un héros. En prime, le héros doit souvent se sacrifier à la fin et je suis sûre que vous n'avez pas envie de voir mourir votre chouchou.
Donc, nous allons nous poser une question fondamentale : qui est le personnage principal de l'histoire ? Parce que, voyez-vous, on ne va pas la raconter de la même façon selon qui est le personnage principal. D'ailleurs, vous feriez bien de parler au pluriel dès à présent et de reprendre dès le début le travail de caractérisation parce qu'il y aura forcément plusieurs personnages. A moins que votre histoire soit un monologue se concentrant sur l'introspection d'un seul personnage, il y aura toujours des interactions entre les différents personnages. Le simple fait d'écrire un dialogue implique qu'il y a au moins deux interlocuteurs. A ceux qui me diront : "Oui mais le personnage peut faire les questions et les réponses, genre il a plusieurs personnalités et tout", je réponds que là n'est pas la question. Sommes-nous dans le cas du monologue centré sur l'introspection d'un seul personnage ? Non. Il est question ici de la majorité des textes, donc des textes où plusieurs personnages se parlent.
Donc, grande révélation : votre histoire comporte plusieurs personnages. Bien sûr, l'un d'eux a plus d'importance que les autres mais ça ne vous empêche pas de réfléchir un minimum sur ceux qui l'entourent. En effet, si vous n'avez effectué un travail préparatoire que sur un seul personnage, ça va se sentir : subjectivité, lourdeurs, inactions... la liste est longue.
Le principe même d'une histoire, et je ne devrais pas l'écrire tellement c'est évident, c'est la résolution d'un problème, un but à atteindre. Or un personnage seul ne va pas se poser de problème trop longtemps. Ce sont d'ailleurs souvent les autres qui nous posent problèmes, du coup l'interaction avec d'autres personnages est obligatoire. Alors, on reprend sa petite feuille et on se creuse à nouveau la tête pour tous les personnages significatifs, qui auront leur importance dans l'histoire.

4.2 Point de vue interne ou externe ?

Vous savez tous qu'il y a plusieurs manières de raconter une histoire (narration). Ce paragraphe va être très simple : je vais me contenter de vous donner des exemples puisque ce ne sont que des rappels de vos cours de français de collège.

Point de vue interne
Reid observait toujours l'agitation autour de lui avec une certaine incrédulité. JJ partait à gauche, Hotchner à droite, Morgan sur les talons, Prentiss avec Rossi. Tout le monde disparut par la porte du bureau alors que Reid rangeait encore sa copie du dossier.
« Reid, dépêche-toi, on a besoin de toi là-bas », entendit-il. C'était la voix de Rossi et il ne semblait pas ravi de l'attendre. Reid, légèrement tendu, s'emmêla dans le rangement de son dossier et rejoignit Prentiss et Rossi en trottinant, espérant ne pas se faire trop remarquer.

Point de vue externe
Reid observait toujours l'agitation autour de lui avec une certaine incrédulité, ce que tout le monde dans l'équipe avait depuis longtemps constaté et plus personne ne s'en formalisait. Ils savaient qu'il s'absorbait complètement dans le dossier dès qu'il l'avait en main aussi lui fallait-il quelques secondes avant de réaliser que les autres s'étaient déjà répartis les tâches. JJ partit donc de son côté pour préparer la conférence, songeant à changer de chemisier – Henry avait mâchouillé le col de celui-ci et il restait une petite tache. Hotchner se dirigea droit vers le commissaire pour rediscuter de son comportement, suivi de très près par Morgan qui avait encore quelques mots à dire à ce crétin arrogant incapable de reconnaître un tueur en série après sept meurtres. Morgan savait qu'il ne fallait pas reporter sa rage contre les forces de police locales mais ça le démangeait. Quant à Prentiss et Rossi, ils quittèrent le poste de police pour retourner sur la dernière scène de crime, espérant trouver de nouveaux éléments. Rossi s'arrêta sur le pas de la porte, regarda derrière lui et constata que Spencer Reid était toujours plongé dans le dossier.
« Reid, dépêche-toi, on a besoin de toi là-bas », lança-t-il sur un ton impatient mais un rien amusé. Il sourit à Prentiss, amusée, lorsqu'ils virent Reid s'emmêler les pinceaux en rangeant le contenu de sa copie du dossier avant de les rejoindre en trottinant, un sourire mal assuré aux lèvres comme excuse.

Qu'est-ce qu'on voit ?
Que les deux paragraphes n'ont pas la même taille, pourtant ils racontent à peu près la même chose. La base reste la même mais les choses sont écrites de manières différentes. La première version est une suite d'actions. La deuxième développe et en raconte plus.

4.3 Point de vue limité vs point de vue omniscient

Appuyons-nous sur les deux exemples précédents pour tirer quelques conclusions.
Le point de vue interne, comme vous l'avez très certainement remarqué, est aussi un point de vue limité dans ce court prompt. On n'a que les impressions du personnage principal, Spencer Reid, aussi pouvons-nous conclure que le point de vue limité est subjectif. En effet, si on se contente de rester ancré dans la tête d'un seul personnage (le narrateur), on ne saura pas ce qui se passe dans la tête des autres. C'est logique et irrévocable : vous savez lire dans l'esprit des gens, vous ? Moi non. Je ne peux que deviner ce qu'ils pensent et j'interprète leurs actions. Quelqu'un d'autre n'arrivera pas forcément aux mêmes conclusions que moi aussi mon point de vue est-il subjectif, je ne détiens pas la Vérité (Vérité qui, d'ailleurs, n'existe pas en unique exemplaire puisque chacun a sa propre version de la Réalité donc de la Vérité – capiche ?).
En revanche, dans le deuxième prompt, on a une foule de renseignements sur tous les personnages et on comprend que Rossi n'en veut en fait pas à Reid. On prend en considération tous les personnages. Le récit devient la somme de tout ce qu'ils savent. On a un point de vue omniscient.
Bien sûr, j'ai forcé le trait dans les deux cas pour bien marquer la différence.
Attention ! Un point de vue interne n'est pas forcément limité ! Un point de vue externe n'est pas forcément omniscient ! Tout dépend du type de narration que vous utilisez mais ce n'est pas là le sujet de ce texte (oui, c'est salaud de vous faire saliver mais de ne rien vous donner).

5. Réactions du personnage selon la situation

Dernière partie avant la conclusion mais celle-ci sera à utiliser durant la rédaction de votre fanfiction, contrairement aux autres qui constituaient le gros du travail préparatoire.

5.1 Que feriez-vous à sa place ?

C'est la question à laquelle pourrait se réduire tous les problèmes mais elle est en réalité beaucoup plus difficile que ce qu'elle paraît. Pourquoi ? Parce que vous n'êtes tout simplement pas un héros. Vous êtes le personnage principal de votre vie mais pas autre chose (enfin, si : vous êtes un figurant dans la mienne). Je vous ai expliqué dans la première partie qu'il fallait vous détacher des personnages empruntés et maintenant je vous demande de vous mettre à la place des personnages. Je sais, ça peut paraître contradictoire et c'est là qu'est la difficulté. Vous devez incarner chaque personnage à tour de rôle et non pas vous incarner dans un personnage en particulier.
Encore une fois : pourquoi ? Parce que la première réaction à laquelle on pense est souvent la bonne. Bien sûr, vous n'êtes pas un ninja ni un magicien et encore moins un gros bras de la mafia ou assimilé. Cela dit, vous arrivez bien à vous imaginer en héros alors pourquoi pas en personnages qui ont deux-trois particularités ?
Mettons-nous en situation : une attaque de ninjas.
Si vous êtes un ninja, vous allez esquiver avec votre super-vitesse-que-personne-il-vous-voit-quand-vous-bougez-et-même-que-ça-fait-des-traits, ou vous utiliserez la dernière technique à la mode sur le fandom (rappel : le bon vieux kawarimi est aussi efficace et n'est pas une invention du manga Naruto), ou vous sortirez votre kunai pour parer. Bref, vous faites un truc de ninja.
Si vous êtes un magicien, vous allez réciter vite-fait une formule quelconque et un bouclier vous protègera (oui oui, même des ninjas) ou bien vous invoquerez votre hippogriffe-licorne-dragon-démon de l'enfer pour leur pététer la gueule, à ces drôles en pyjama noir. Option : le reste de l'équipe (oui, vous êtes un magicien, après tout, y'a que le voleur qui en fait moins que vous en combat).
Si vous êtes un gros bras de la mafia ou assimilé, vous sortirez préférentiellement votre gros fusil mitrailleur semi-automatique et un couteau dans l'autre main pour montrer que vous savez faire deux choses à la fois, ou votre téléphone portable pour appeler des renforts ou bien votre cigare pour vous la péter, parce qu'ils font vraiment pitié, ces gringalets japonais récitant le menu du sushi-bar du coin.
A chacun son attitude et son comportement. C'est pour ça que vous devez être bien renseigné sur les personnages que vous utilisez.

5.2 Retour aux sources

Vous avez un doute sur le comportement que vont adopter vos personnages dans une situation, même si vous connaissez leur caractère, leur passé, etc., et que vous vous êtes mis à leur place.
Eh bien rien ne vaut un petit plongeon dans la source dans ces cas-là. Relisez un passage du livre/du manga auquel votre problème se rapporte ou bien refaites-vous un épisode traitant de ce problème. Il n'y a rien de mieux que de s'imprégner de l'univers de base pour repartir sur de bonnes bases.
Bien sûr, y'a un tas de gens qui préfèrent écrire des UA parce que c'est trop dur de coller au canon. Que faire dans pareil cas ? Ha ha. Vous demandez l'avis de la mauvaise personne... Comme je déteste les UA mal faits, je dirai simplement : arrête les frais. Pour moi, écrire un UA sans réutiliser l'univers, c'est fuir l'univers en question. Pourquoi diable écrire une fic sur tel univers si on n'en veut pas ? Ah, les personnages ? Mais ils n'ont plus qu'un physique vaguement ressemblant dans cette réécriture douteuse de vos fantasmes d'ado ! Je sais, c'est dur à lire mais écrire une bonne fanfiction est aussi difficile. Par contre, en écrire une médiocre voire une mauvaise est extrêmement simple. Et comme j'ai tendance à préférer la difficulté à la simplicité...
Ça arrive à tous les auteurs de douter de ce qu'ils écrivent. Ça arrive à tous les auteurs d'avoir un coup de mou sur un projet. Ça arrive à tous les auteurs de relire quelques volumes ou se refaire quelques épisodes. Quelque part, c'est même nécessaire car ce retour aux sources permet de se recaler sur le ton d'une série ou bien simplement de faire une pause.

5.3 Rappel : vous écrivez une œuvre de fiction

Incroyable mais vrai : ce qui se passe dans votre texte est exceptionnel. A part si vous plagiez, c'est même unique. Il est effectivement très peu probable qu'un binoclard sur un balai volant traverse votre cuisine de part en part, poursuivit par des draps noirs hurlant.
On a tous tendance à exagérer dans ce qu'on écrit. Par exemple, au début, j'écrivais correctement, je donnais du vous, je respectais mon lectorat. Maintenant, je continue à vous voussoyer mais je vous maltraite et j'emploie un langage beaucoup moins soigné. Dans une fic, c'est pareil : on a tendance à s'emporter. Du coup, ce qui aurait nécessité un petit shuriken se retrouve avec la technique-ninja-de-la-mort-qui-tue façon Mary Sue aux pouvoirs uniques (option : panthère de compagnie). Certes, c'est une œuvre de fiction et ce sera une très bonne excuse suivant l'univers que vous employez (oui parce que les technique-ninja-de-la-mort-qui-tue dans Criminal Minds, va falloir les justifier sérieusement). Seulement, vos personnages sont humains. Ils ne peuvent pas encaisser trois Kame Hame Ha mode Super Saiyen sans broncher (sauf dans une fic Dragon Ball). Ils ne peuvent pas sauter d'un immeuble de trente étages et atterrir après un quintuple salto arrière sans se faire mal (au passage, "mais y'avait de l'eau en-dessous !" n'est pas valable comme explication : au-delà de dix mètres, un plongeon dans l'eau peut être mortel).
Il faut reposer les pieds par terre de temps en temps. Votre personnage a peut-être un niveau de puissance, d'intelligence ou de perfection impressionnant mais ça sent quand même pas la rose quand il pète. Il aura mal si on le tape, il ne peut pas tout savoir et il commet des erreurs d'appréciation (être trop confiant apporte souvent ce genre de désagrément). Jouez-en au lieu d'en faire un demi-dieu.

6. Conclusion

Voici un petit récapitulatif de cette aide et deux derniers points qui s'approchent plus de l'aide à l'écriture que de l'aide aux personnages mais qui sont quand même importants.

6.1 Points importants

- Le personnage principal n'est pas vous.
- Donner un tout petit quelque chose au personnage principal facilite son utilisation et permet de l'approfondir.
- Le lecteur n'est pas dans votre tête : pensez à expliquer, à justifier les changements opérés.
- Les personnages sont définis par leur caractère, leur physique, leurs habitudes, leur langage et leur comportement.
- Ces cinq points sont inter-influençables.
- Le passé construit le personnage.
- Trop de traumatisme tue le traumatisme.
- L'apprentissage conditionne le personnage.
- Le passé inventé d'un personnage doit être en accord avec ce qu'il est lorsque l'histoire officielle débute.
- Il n'y a pas qu'un seul personnage dans l'histoire.
- Il faut bien choisir le point de vue du personnage principal.
- Devenez temporairement le personnage dans une situation donnée, ne prenez pas sa place.
- Relire un passage ou revoir un épisode fait du bien à l'auteur fatigué.
- Vous écrivez une œuvre de fiction mais faites attention à ne pas trop en faire.

6.2 Avoir des avis extérieurs et sincères

Quand je lis ici et là qu'écrire est un acte égoïste, je ne peux qu'approuver. Écrire, c'est avant tout se faire plaisir. Publier, c'est faire plaisir aux autres.
Cependant, je sais que je suis quelqu'un qui a, finalement, peu confiance en ce qu'il fait lorsqu'il s'agit de publication, c'est pourquoi je recherche très souvent l'avis de personnes qui me sont proches mais que je sais sincères. Par exemple, cette aide est passée sous les yeux de trois personnes durant sa rédaction. Il est rare que je n'envoie pas une version à moitié finie d'un chapitre à ma correctrice pour être sûre que le texte est bon (bon, après, je sais que ma correctrice n'est pas vraiment objective dès qu'il s'agit des univers que je développe mais si y'a un problème quelque part, elle le voit quand même et n'hésite pas à m'en faire part).
Ce que je veux dire, c'est qu'il n'y a rien de mal à demander l'avis de quelqu'un d'autre, pour voir si tout colle, surtout si vous utilisez pour la première fois un personnage. D'ailleurs, mettez-vous dans le crâne que votre tentative sera un échec (je parle de la première fois où on l'imagine agir dans notre petite tête, avant de s'endormir). Comme ça, vous commencez forcément de très bas et vous ne pourrez que progresser !

6.3 Mal faire n'est pas un drame (offre soumise à condition)

Comme je le disais, vous allez vous ramasser. Votre travail ne peut pas plaire à tout le monde, c'est comme ça et c'est normal. Avez-vous réussi à marcher comme ça, d'un coup ? Vous vous êtes hissé sur vos petites jambes potelées et avez mis un pied devant l'autre sans vous retrouver la tronche par terre (ou dans la chaise la plus proche) ? Ça arrive mais admettez que c'est rare.
C'est la même chose dans le domaine de la fanfiction. Vous échouerez, c'est obligatoire. Mais rassurez-vous, ça ne fait que mal à votre précieux petit ego de débutant. Mal faire n'est pas un problème. On apprend tous, on commence tous un jour. C'est en forgeant qu'on devient forgeron, ça vous dit rien ?
Il faut simplement l'admettre et accepter d'écouter les conseils et les avis des autres. On a tous notre version d'un personnage en tête (moi j'aime bien rendre Sasuke un peu soupe au lait, grognon sur les bords) donc la version qu'on va présenter ne va pas plaire à tout le monde. Ce n'est pas un drame et souvent les lecteurs apprécieront de découvrir une autre version que la leur.

 

Voilà, c'est fini. J'espère que la lecture n'a pas été trop éprouvante, que vous êtes arrivé jusqu'ici avec un ego pas trop froissé et que vous allez réfléchir un peu la prochaine fois que vous envisagerez une fic avec bitch!Naruto.

Par Hitto-sama